Les spécialistes MPR pratiquent l’ENMG dans un contexte principalement chirurgical et leur recrutement porte surtout sur la pathologie neurologique « mécanique » : compressions radiculaires, syndromes canalaires, traumatologie nerveuse… Néanmoins, il est important de savoir reconnaître d’autres causes lorsqu’un tableau n’est pas franc, que les résultats du bilan sont discordants, si le patient annonce une pathologie générale connue ou si des signes d’alerte vers d’autres diagnostics sont présents. Dans ce cas, il faut connaître les fondements de la démarche diagnostique et profiter de la consultation pour conduire un bilan de débrouillage construit qui sera utile au neurologue spécialisé vers qui on orientera le patient, si nécessaire.

Définitions

Les neuropathies périphériques recouvrent les altérations :

  • des nerfs crâniens,
  • des racines spinales et ganglions rachidiens
  • des troncs nerveux périphériques
  • du système nerveux autonome.

Il y a trois grandes catégories de neuropathies :

  • les mononeuropathies : ne touchant qu’un tronc nerveux ou une racine. Cela résulte le plus souvent d’une lésion « mécanique » : syndrome canalaire, compression nerveuse, lésion traumatique. Mais il existe aussi des radiculites isolées comme le zona.
  • les mononeuropathies multiples : atteinte simultanée ou successive de plusieurs troncs nerveux. L’atteinte est asymétrique. Les vascularites en sont la cause dominante.
  • les polyneuropathies (PN): l’atteinte est diffuse et, le plus souvent symétrique.
    • distale : PN longueur dépendantes, les plus fréquentes, commençant aux membres inférieurs. Surtout axonales, elles évoluent de manière centripète.
    • proximo-distale : polyradiculoneuropathies (PRN) démyélinisantes.

Parmi les polyneuropathies, certaines peuvent néanmoins donner des atteintes cliniques asymétriques : 

  • L’hypersensibilité congénitale à la pression (neuropathie tomaculaire), qui donne des syndromes canalaires multiples, simultanés ou successifs.
  • Les polyneuropathies myéliniques motrices à blocs de conduction (PMMBC) : les blocs se produisent en dehors des points de compression.

Les causes des polyneuropathies

Elles sont très nombreuses, mais en simplifiant à l’extrême, on peut dire qu’il y a quatre grandes catégories de mécanismes :

  • Les atteintes microvasculaires : vascularites surtout, qui donnent des atteintes axonales tronculaires asymétriques ;
  • Les atteintes « trophiques », qui donnent des atteintes axonales : diabète, alcool, carences, intoxications ;
  • Les atteintes « immunologiques » : elles touchent la myéline en majorité et donnent des troubles de la conduction. Elles couvrent un très large champ étiologique : infections, néoplasies, gammapathies, maladies de système…
  • Les atteintes génétiques, qui se répartissent en atteintes axonales ou atteintes myéliniques selon les cas. La plupart ont été groupées sous la bannière de la maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT).
  • Les atteintes infiltratives : amylose, lymphome

Les atteintes infectieuses peuvent avoir un mécanisme toxique immédiat (diphtérie), ou immunitaire, souvent décalé (maladie de Lyme, Guillain-Barré…).

A la marge des polyneuropathies, on trouve :

En proximal, les neuronopathies :

Les atteintes du motoneurone au niveau de la corne antérieure. Les fasciculations sont très évocatrices.

  • La sclérose latérale amyotrophique. L’atteinte périphérique (pseudo-polynévritique) s’associe à une atteinte de la voie pyramidale, donnant un tableau « centro-périphérique » purement moteur. L’atteinte peut commencer de manière très localisée, au membre supérieur, puis s’étendre vers les racines et le bulbe.
  • La myélopathie cervicarthrosique, révélée par une maladresse aux gestes fins (se boutonner), elle menace la marche (syndrome pyramidal). L’atteinte est sensitivo-motrice. Un rétrécissement canalaire cervicarthrosique et un hypersignal médullaire antérieur en T2 signent le diagnostic.

Les atteintes des ganglions spinaux (ganglionopathies ou neuronopathies sensitives).  Elles donnent des tableaux sensitifs purs. Les syndromes paranéoplasiques (syndrome de Denny-Brown, souvent associé au cancer pulmonaire à petites cellules) en sont la cause principale.

En distal : les syndromes myasthéniques et les myopathies/myotonies

Ils se traduisent tous par une atteinte motrice pure, avec une fatigabilité à l’effort.

Les atteintes de la jonction neuromusculaire :

  • La myasthénie est une maladie auto-immune : Ac anti-récepteurs à l’acétylcholine, anti MUSK. Un thymome est fréquent. L’ENMG recherche un décrément aux stimulations répétitives, un jitter à l’étude de fibre unique.
  • Le syndrome de Lambert-Eaton est un syndrome paranéoplasique donnant un tableau similaire.

La pathologie musculaire :

  • Les myopathies : chez l’adulte, on pense surtout à la dystrophie des ceintures (forme mineure de la myopathie de Duchenne) et à la myopathie facio-scapulo-humérale. L’EMG est souvent normal. Les CPK sont élevées.
  • Les myosites : maladies de système
  • Les myotonies (maladie de Thomsen) et dystrophies myotoniques (maladie de Steinert). Le patient a une difficulté à desserrer la main, le faciès hébété est évocateur, la marche peut devenir difficile. Les salves myotoniques sont caractéristiques à l’ENMG. Des troubles de la conduction peuvent être associés.