L’appareil

Tout appareil d’ENMG comporte les éléments de base suivants :

  • Un boîtier de réception (la têtière)
  • Une dalle électronique qui traite les signaux électriques recueillis
  • Un stimulateur
  • Une unité centrale, en général PC
  • Un écran
  • Une imprimante

Le boîtier de réception (la têtière)

C’est par lui que transitent tous les signaux électriques reçus depuis les électrodes posées sur le patient : potentiels moteurs ou sensitifs, tracés d’origine musculaire, signaux encéphalographiques. Les appareils de base ont deux voies de réception : une est dédiée à la stimulodétecton, l’autre à la réception EMG. C’est suffisant en consultation ENMG telle que nous la pratiquons en MPR. Pour faire du monitoring médullaire au bloc opératoire, il faut au moins quatre voies.

Boitier de réception à 3 voies. De gauche à droite, les canaux sont dédiés à la stimulodétection, à l’EMG à l’aiguille et aux potentiels évoqués somesthésiques.

La connexion se fait par des prises DIN ou par des paires de prises monopolaires « touch proof ». A cela s’ajoute obligatoirement une prise de terre.

La qualité de la conduction électrique (impédance) peut être mesurée depuis le boitier de réception ou depuis l’unité centrale, selon les appareils.

La têtière comporte aussi un préamplificateur qui participe au traitement du signal.

Le stimulateur

Le stimulateur peut être séparé de l’appareil d’ENMG ou intégré à la dalle. Il est connecté par une prise DIN aux électrodes de stimulation ou à d’autres dispositifs : marteau à réflexe, stimulateur optique ou auditif, stimulateur magnétique.

Stimulateur à commandes intégrées

 

Stimulateur simple

Un seul stimulateur suffit pour l’ENMG courant. Deux stimulateurs sont nécessaires pour le monitoring médullaire per-opératoire ou pour des techniques spéciales.

La dalle électronique



Commandes frontales

 


Connections stimulateur et réception

 


Connection au PC et alimentation

La « dalle » est le cœur de l’appareil d’ENMG.  Sa qualité  détermine la facilité avec laquelle ou obtiendra des signaux bien lisibles. Il a plusieurs fonctions :

  • Synchronisation de la stimulation et de la réception séquentielle du signal obtenu
  • Réception des signaux d’ENMG en continu
  • Filtrage des parasites
  • Amplification du signal utile

Les dalles comportent généralement une série de boutons de contrôle et de réglage de la stimulation et de la réception. Les actions sont affichées sur la console.

La console informatique


Unité centrale de PC

C’est l’interface opérationnelle entre le médecin et la dalle électronique. Autrefois, elle était intégrée à la machine, qui ressemblait aux anciens appareils analogiques. A présent, on utilise des unités centrales informatiques de type PC de bureau ou ordinateur portable. Les modèles sont imposés par les marques pour des raisons de normalisation. On ne peut pas changer facilement d’unité centrale sans passer par le fournisseur.

Le logiciel installé sur l’ordinateur est propre à chaque marque. Il permet d’afficher les réglages et les signaux enregistrés sur l’écran. Il permet aussi des calculs automatiques de vitesse et le moyennage des courbes répétitives. Enfin, il permet la présentation des résultats sous la forme d’un rapport : tableaux de valeurs, tracés, commentaires du médecin. Ce rapport peut être imprimé sur une imprimante standard.

Les logiciels des appareils d’ENMG sont loin d’avoir suivi les évolutions de l’informatique grand public.  Ils sont souvent dérivés de logiciels conçus sous DOS, pas très ergonomiques, plutôt lents, pas faciles à paramétrer tout seul. Pouvoir compter sur un fournisseur serviable et facilement accessible est un critère de choix majeur.

Les électrodes

Electrodes de surface

Elles servent à la stimulo-détection.

  • Pour la stimulation nerveuse, les paires d’électrodes métalliques sont plus hygiéniques et fiables que les électrodes en feutre, trempées dans l’eau.
  • Pour la réception, les électrodes adhésives indépendantes sont plus pratiques que les autres dispositifs.

Pour l’électrode de terre, ma préférence va à un disque métallique enduit de pâte conductrice et scotché sur la peau.

La polarité des électrodes

  • Cathode = négative (noire) = active
    pour la stimulation et la réception
  • Anode = positive (rouge) = référence
  • Terre (verte)

Quand on fait une stimulodétection motrice ou sensitive, les électrodes noires (négatives) de la stimulation et de la réception doivent se faire face.

Electrodes aiguilles

Elles servent à étudier l’activité de repos et de contraction volontaire des muscles : c’est l’électromyographie à l’aiguille.


Une aiguille longue 75 mm x 0,60 mm (23 G)
et une aiguille fine 25 x 0,30 mm (30 G)

On utilise des aiguilles concentriques : l’anode et la cathode sont séparées par un film isolant. L’extrémité de l’aiguille détecte ainsi les variations de potentiel dans une petite zone musculaire, soit l’activité d’un groupe d’unités motrices à proximité. Les aiguilles fines sont les plus utilisées. Une aiguille longue et plus grosse peut être nécessaire pour étudier des muscles profonds avec un panicule adipeux épais (par exemple, pour le moyen fessier).

Les électrodes aiguilles sont également utilisées pour la stimulodétection de nerfs profonds, mais nous n’en avons pas l’usage.

Enfin, les électrodes aiguilles peuvent être couplées à une aiguille d’injection, en particulier pour les infiltrations de toxine botulique. Dans ce cas, on peut les utiliser pour stimuler le muscle au point moteur ou pour recueillir son activité de contraction volontaire.

Les câbles et les prises

Les câbles peuvent être simples ou blindés. Les câbles blindés sont utiles si l’activité ENMG est réalisée dans un milieu riche en parasites électriques et/ou doit recueillir des signaux faibles, avec un bruit élevé. Le meilleur exemple est le monitoring des potentiels évoqués moteur ou sensitifs au bloc opératoire.

Les prises sont principalement de deux types :

  • Les prises monopolaires, dites « touch-proof » : elles sont utilisées par trois : active, référence, plus la terre.
  • Les prises DIN : elles ont plusieurs broches permettant de rassembler l’active, la référence et la terre. La terre peut néanmoins être conduite à part par une prise monopolaire.

 


Prise DIN

 


Prise touch proof

La stimulation

Plusieurs modes de stimulation sont possibles

  • Electrique, motrice ou sensitive
  • Mécanique : marteau à réflexe
  • Visuelle ou auditive
  • Magnétique cérébrale pour les potentiels évoqués moteurs.

La stimulation déclenche un influx nerveux qui va se propager dans les deux directions, de part et d’autre du nerf : vers l’effecteur, vers le cerveau.

Le recueil peut se faire à différents niveaux : sur le nerf, sur le muscle, sur la peau, sur la moelle, sur le cerveau.

L’appareil ENMG synchronise la stimulation et le recueil de la réponse qui comporte un artéfact de stimulation, une ligne de base, une réponse utile.

Les paramètres de stimulation

La stimulation est réglée par la quantité d’énergie délivrée dans les tissus pour stimuler les fibres nerveuses. Les deux paramètres sur lesquels on peut agir sont l’intensité (débit d’électrons) ou le voltage (différence de potentiel) qui sont liés par la loi d’Ohm.

Loi d’Ohm :

  • U (voltage) = I (intensité) * R (résistance)
  • I (Ampères) = U (Volts) / R (Ohms)

Puissance électrique d’un appareil

  • Puissance (Watts) = Intensité (Ampères) * Voltage (Volts)

La loi de Joules : énergie thermique dépensée par un courant continu dans un circuit résistif

  • Energie (Joules) = Résistance (Ohms) * Intensité² (Ampères) * T (secondes)

Les appareils modernes délivrent une stimulation définie en intensité et durée de stimulation. L’énergie produite évolue comme le carré de l’intensité.

  • Intensité (mA)
    • Seuil de perception : 1 mA
    • Stim motrice : 10-20 mA (parfois plus)
    • Stim sensitive : 5-15 mA (parfois plus)
    • Seuil d’électrocution : 100 mA (limite des appareils)
  • Durée d’impulsion
    • Moteur : 03 à 0,7 ms
    • Sensitif : 0,2 ms
    • Fréquence d’impulsion : de préférence un nombre premier pour limiter le risque d’interférences.
    • SD sensitive : 3 Hz
    • PES : 2,3 Hz

Le traitement du signal recueilli

L’amplificateur différentiel

Le bruit électrique est le grand ennemi de l’électromyographiste, surtout pour l’enregistrement des potentiels sensitifs et des potentiels évoqués somesthésiques. En effet, on travaille alors sur des potentiels de l’ordre du micro-Volt, alors qu’en stimulodétection motrice, on a affaire à des potentiels de l’ordre du millivolt.

Les sources de bruit électrique sont : 

  • Le courant de secteur 60 Hz
  • Le bruit du système électronique
  • L’environnement électrique et ondes radio-électriques
  • L’activité biologique distante (muscles, cerveau)

L’élimination du bruit se fait par l’amplification différentielle

  • Le bruit donne, en principe, les mêmes variations de potentiel sur les deux électrodes (positive et négative).
  • La machine amplifie le signal de l’électrode active (noire, négative)
  • Elle inverse et amplifie le signal de l’électrode de référence (rouge, positive)
  • Elle combine les deux signaux : cela neutralise le bruit et amplifie le signal utile

Les signaux recueillis sont en fait des différences de potentiel avec l’électrode de terre. Si celle-ci n’est pas branchée, le signal devient impossible à traiter. Pour avoir le maximum d’efficacité, l’électrode de terre doit avoir une surface importante et doit être placée entre la stimulation et le recueil, ou à proximité.

Le signal utile est, au final, la différence de potentiel entre l’électrode négative (active) et l’électrode (référence).

  • En stimulodétection motrice, l’active est mise sur le point moteur du muscle et la référence sur le tendon d’insertion (corps-tendon).
  • En stimulodétection sensitive, les deux électrodes sont posées sur le nerf (méthode orthodromique) ou sur la peau (méthode antidromique). La négative est dirigée vers la négative de stimulation.
  • En EMG à l’aiguille, les électrodes coaxiales enregistrent l’activité des fibres motrices au sein d’un volume de réception proportionnel à la dimension des aiguilles.

Les filtres

La qualité de l’amplificateur est déterminante pour obtenir un tracé de bonne qualité, qui se traduit par une ligne de base bien plate et horizontale. L’utilisation de filtres est un « pis aller ». S’ils sont trop resserrés, ils peuvent tuer le signal utile, surtout si le rapport signal/bruit est faible, par exemple pour le recueil des PES.

On utilise :

  • Un filtre des basses fréquences = « passe haut » de 5 à 20 Hz. Les signaux de basse fréquence rendent la ligne de base instable.
  • Un filtre des hautes fréquences = « passe bas » de 3 à 5 kHz. Les signaux de haute fréquence provoquent un bruit de fond.

L’affichage

Le son du haut-parleur

C’est un moyen très intuitif de restituer le signal. On reconnait très vite le bruit de mitraillette des tracés neurogènes, le bruit d’avion en piqué des décharges myotoniques et le bruit de l’activité spontanée de repos des muscles dénervés.

L’affichage à l’écran

La vitesse de défilement doit être adaptée à la latence et à la durée du signal, de même que le temps d’enregistrement en stimulodétection. Sinon, on risque de ne pas voir la composante tardive de la réponse.

  • Réponse motrice : 5 ms/division
  • EMG : 30 à 50 ms/division ; enregistrement continu

L’amplitude est réglée sur l’axe vertical. Il faut distinguer :

  • L’amplification électronique qui produit le signal brut
  • Le gain numérique, qui modifie l’échelle de présentation du tracé à l’écran. C’est un simple agrandissement comme le zoom numérique d’un smartphone par rapport au téléobjectif optique d’un appareil photo.

Les réponses motrices s’affichent en mV/div, les réponses sensitives en µV/div. 

Pour l’EMG, on utilise des échelles de 100 µV/div pour les activités de repos et les micropotentiels de réinnervation et de 1 mV/div pour les tracés volontaires.

L’impression

Produire des tracés de qualité est important pour pouvoir relire ultérieurement le rapport d’ENMG, et éventuellement le réinterpréter. Pour cela, les tracés imprimés doivent adopter les mêmes échelles que les affichages à l’écran. C’est particulièrement vrai pour les tracés d’EMG à l’aiguille.

Comme on ne peut pas imprimer toute la séquence d’EMG mise en mémoire par l’appareil, il faut bien choisir les séquences les plus significatives.

Les stimulations répétitives

Les stimulations répétitives peuvent avoir deux objectifs :

  • Isoler un signal faible, noyé dans le bruit parasitaire : réponses sensitives, potentiels évoqués somesthésiques, sensoriels ou de nerfs. Le bruit donne un tracé aléatoire alors que la stimulation répétitive génère une réponse à délai fixe. Le « moyenneur » calcule automatiquement la moyenne des réponses obtenues. Le bruit s’annule, le signal utile ressort.
  • Mesurer la variation de la réponse musculaire du fait d’un épuisement pathologique de la transmission neuromusculaire. Ce sont les techniques utilisées dans la myasthénie et le syndrome de Lambert-Eaton : mesure du décrément et Jitter.

 

Stimulation répétitive chez un sujet sain (à gauche)
et dans le cas d’un décrément pathologique (à droite)